samedi 17 septembre 2011

Nelly Arcan et sa honte dont tout le monde parle

J'avais vu l'entrevue de Nelly Arcan à Tout le monde en parle un beau dimanche de septembre en 2007, comme ça, purement par hasard. C'était une de ces rares fois où j'avais regardé l'émission. Étrangement, ça m'avait marquée. J'en avais ensuite parlé avec mon copain, plusieurs années plus tard, et lui aussi s'en souvenait.

Il faut dire qu'avant l'entrevue, j'avais vu des affiches de l'écrivaine apposées sur les murs de la bibliothèque où je travaillais à ce moment faisant l'éloge de son livre Putain. Je m'étais promis de ne pas le lire puisqu'il semblait utiliser comme beaucoup trop d'autres le sexe comme outil principal de marketing.

En la voyant arriver à Tout le monde en parle, j'avais été intriguée de découvrir cette auteure à l'allure provocatrice dont tout le monde semblait justement parler. Blonde teinte et mince à la robe moulante, à la poitrine assez généreuse, au décolleté plongeant et à l'attitude pseudo-séductrice-on-sait-pas-trop, je me suis dite qu'il n'était pas surprenant qu'une femme comme ça ait écrit un livre intitulé Putain et me suis pratiquement demandée si elle n'avait pas écrit là une autobiographie.

J'ai donc écouté l'entrevue où Nelly Arcan dénonçait la consommation de la féminité et où les animateurs se moquaient en disant que ses propos étaient contradictoires avec ce qu'elle portait. Et j'avais opiné énergiquement du chef devant mon téléviseur.

Le pire, c'est qu'elle ne semblait pas s'en rendre compte. Et c'est ça, ultimement, qui m'avait troublée. Il faut, je crois, jusqu'à un certain point, s'assumer. Porter une telle robe et avoir une telle attitude et s'attendre à des éloges sur autre chose que son corps est presqu'impossible. Dany Turcotte avait même blagué que même lui avait de la difficulté à lui regarder le visage, malgré son orientation sexuelle. Mais elle semblait perdue, comme si ce qu'elle portait était la chose la plus naturelle du monde et qu'aucune contradiction n'était faite.

Combien de femmes font la même chose? Combien se disent féministes puis font ce qu'elles critiquent?

J'avais passé du dégoût initial à une sorte de pitié pour Nelly Arcan. Et je me souviens avoir pensé que la cause féminine continuait de reculer avec des figures de proue comme la sienne.

Paradis, clef en main

Je croyais que cette histoire était close lorsque j'ai appris, par les écrans du métro, la mort de l'écrivaine. Ma première réaction était de la non-surprise et presqu'un "Évidemment". Dur de juger quelqu'un sur une simple entrevue, mais encore, elle m'avait faite une assez forte impression et c'était un geste, certes malheureux, qui cadrait avec le personnage. Pas si surprenant quand on y pense, mais encore, étrange. Ça ne me laissait pas indifférente.

À la bibliothèque, son livre posthume Paradis, clef en main était disponible. Un livre sur le suicide écrit par une suicidée? Je n'ai pu résister à céder à la curiosité morbide tout en m'excusant et en me disant que je voulais surtout voir si l'écriture de l'auteure valait toute la médiatisation ou si c'était, ultimement, son apparence physique qui était son meilleur atout.

J'ai été impressionnée par ma lecture. Style impeccable, tranchant, idées d'une femme intelligente. J'y trouvais même un terrain d'entente. Avec soulagement, je constatais que j'avais mal jugé l'écrivaine. Son apparence physique exagérément sexuée et ses propos maladroits à l'émission ne rendaient pas justice à la profondeur et l'intelligence de son écriture.

La honte

Il y a deux jours, je vois sur un journal recyclé comment Guy A. Lepage est (encore) impliqué dans un scandale et c'est par hasard, sur le Metro en ligne, qu'en cliquant sur un lien qui devait me mener à un autre article, je tombe sur celui-là. Nelly, encore Nelly.

Il est rare qu'on puisse voir comment quelqu'un jugé publiquement se sent à l'intérieur. Le personnage de Nelly Arcan, plusieurs années après sa mort, s'exprime et continue, à sa façon, de scandaliser. Victime de son propre marketing, elle ne peut reposer en paix et nous laisse seuls, nous qui l'avons pointée du doigt, avec ses mots et ses impressions.

Voici trois citations de sa nouvelle, La honte, que je me permets de copier ici :

« Tu n’apparaissais pas comme ça à l’écran. On dirait que tu portes une robe différente de celle que tu portais à l’émission », affirma Mélanie quelques jours après que Diane et Caroline se furent prononcées.

« Le verdict du décolleté déplacé s’abattrait à nouveau sur elle par la reconnaissance des autres mais aussi sur le verdict déjà en place. »

« La question stupide demandait en retour de l’esprit mais l’esprit l’avait déserté au profit de son visage filmé qui souffrait. Avait-elle répondu quelque chose ? Oui, mais elle ne savait plus quoi. »

Toutes ces critiques adressées au téléviseur et échangées avec mon copain trouvent dans son texte leur réponse. Et à ça, je réponds qu'ultimement, une mauvaise entrevue peut arriver à tout le monde. Mais que l'on est mieux d'être soi-même si l'on ne peut accepter d'être un personnage que l'on ne peut pas être.

Après un deuxième visionnement de l'entrevue

Au deuxième visionnement, le trouble de l'écrivaine est encore plus visible, ses contradictions encore plus grossières, son décolleté encore plus plongeant et ses explications toujours aussi décousues.

Mais au lieu de la bêtise, je vois maintenant de la fragilité. Elle ne semblait décidément pas prête à une telle aventure. Qui le serait vraiment?

Il est vrai qu'il y avait sur le plateau l'ironie habituelle réservée à tous les invités et que les questions portaient davantage sur des citations pouvant porter à préjudice. Pourtant, lorsque l'auteure avoue que son oeuvre porte de prime et d'abord sur le sexe, il n'est pas déplacé pour un animateur de poser des questions sur le sujet. Il en aurait été probablement totalement autrement si ses romans avaient traité de la guerre ou encore de la survie en forêt. J'ai même eu l'impression que les animateurs la ménageaient. Mais à chaque perche qu'ils lui tendaient, elle s'engouffrait dans un nouveau trou, victime de son manque de confiance ou de son stress.

Je ne crois pas qu'ils ont manqué de gentillesse et d'indulgence. Il y en a eu un peu. Ils ont même coopéré à certains de ses arguments (frenchage étant un statement et le culte de l'image atteignant les hommes aussi).

Les écrits restent, mais en même temps, on change tous d'idée, on a tous exagéré un jour ou l'autre, on évolue. Doit-on rester prisonniers de ses paroles et gestes jusqu'à la fin de ses jours? Nous sommes décidément plus dans l'ère du faire que de l'être.

Je ne peux que me ranger du côté de l'idée exprimée sur la carte de Dany Turcotte : "Dans vos livres vous dénoncez le culte de la beauté, la chirurgie plastique et le désir de plaire à tout prix, on peut donc conclure que votre devise est faite ce que j'écris, mais ne faites pas ce que je vis."

Quand une histoire qui commence par hasard se poursuit de cette façon (comme une petite saga), ça vaut la peine de s'arrêter pour y penser. Je crois que je vais lire Putain.

samedi 7 mai 2011

Et si les hommes étaient aveugles?

Constatation : il n'y a pas un jour qui passe sans que je rencontre une femme ou la représentation d'une femme hypersexuée. C'est d'autant plus vrai quand je vais au centre-ville.

Par hypersexualisation, j'entends une femme qui en montre plus qu'elle n'en cache et/ou adopte une attitude aiguicheuse extrême, pas loin de la péripathéticienne à la recherche de clients. Impossible d'ignorer ce phénomène. Et en plus, elles sont faciles à cibler. Elles font tourner les têtes et ces messieurs ont régulièrement un filet de bave au coin de leur bouche grande ouverte à leur passage.

Justement, hier, j'ai vu cette col bleue habillée en jeans serrés, camisole et chemise orange de construction attachée à l'avant comme un chandail bedaine en train de ramasser les déchets avec son rateau en se faisant aller les hanches. Réglementaire? Je n'en sais rien, mais faut le faire pour avoir l'air sexy là-dedans!

Jalouse? Nah! Je pourrais attirer l'attention en me promenant avec une banane sur la tête, mais serait-ce de bon goût? Alors, je vous pose la question : est-ce que se promener en montrant les fesses est vraiment mieux?

Ce qui me peine le plus, c'est que beaucoup de femmes le font de leur propre gré. Est-ce inconscient, par habitude, par besoin d'être regardées ou par manque d'estime d'elles-mêmes?

Peut-on être jolie et belle sans être nécessairement ''sexy''? Parce que ''sexy'' sous-entend ''sexe''. Est-ce que ces femmes hypersexuées un si grand besoin sexuel qu'elles doivent l'afficher à longueur de journée?

Supposons que l'hypersexualisation est principalement destinée aux regards masculins, ce que je crois. J'en viens à me demander ce que serait la société si les hommes étaient aveugles. Dans certains pays, les femmes se voilent pour leur éviter la tentation. S'il est vrai que les hommes sont visuels, peut-être devraient-ils plutôt se voiler les yeux?

Si les hommes étaient aveugles, est-ce que la mode actuelle serait les leggings? Est-ce les que les décolletés plongeants, les mini-jupes, les souliers à talons aiguilles, le maquillage et toutes ces choses inconfortables qui font souffrir celles qui les portent jour après jour existeraient? Est-ce que les femmes s'habilleraient serrées pour montrer leurs courbes? Ne préféreraient-elles pas plutôt porter un large chandail et des pantalons cent fois plus confortables?

La plupart des hommes ne se donnent pas toute cette peine. Ils ont compris depuis longtemps que des vêtements du bon format et qui cachent les parties essentielles sont les meilleurs choix. Pourquoi les femmes n'arrivent pas à cette conclusion aussi? Parce qu'elles croient que leur rôle principal est de séduire et que sans ce pouvoir, elles ne sont rien?

Un autre exemple flagrant d'hypersexualisation féminine :

Lingerie Football League

La liberté d'expression oui, mais quand l'hypersexualisation devient généralisée et normalisée, est-ce qu'on doit intervenir?

À force de se dénuder et d'enlever des couches, il n'y a qu'une conclusion possible : Miss airport calendar.

Ce n'est pas que je dis non à la beauté, je dis plutôt non à l'hypersexualisation.

Parce que, sérieusement, en ce moment, c'est moi qui souhaiterais être aveugle.

vendredi 1 avril 2011

Par où commencer?

Le problème avec un thème si large, c'est qu'on ne sait pas par où commencer. On veut dire un tas de choses sans mettre personne directement sous le projecteur ni dévoiler sa vie privée puisque c'est un sujet tellement personnel. En même temps, il y aussi tout ce côté public, mais on ne veut pas répéter les mêmes banalités que tout le monde et surtout pas sans arguments solides.

Alors, quoi de mieux que de se former sur le sujet, même si, au fond, j'en sais déjà pas mal parce que chaque jour je porte un grand E à la fin de tous les adjectifs qui s'accordent avec mon nom. Il existe des cours gratuits universitaires sur le sujet en ligne. C'est merveilleux la technologie. Je crois que je vais tenter le coup. C'est offert par l'institut de technologie du Massachussetts.

mercredi 9 mars 2011

La femme ou plutôt l'humaine

Hier, c'était la journée "de la" femme ou "des" femmes (je vous laisse choisir).

Une nouvelle fois, on a senti les tensions dans l'air. Au bureau, les femmes étaient invitées à un déjeuner-causerie (organisé par un gars). Une quarantaine de femmes sont venues. Les seuls hommes présents étaient les directeurs (et l'organisateur), occupant comme par hasard les postes haut-placés. Parmi le personnel de soutien, les secrétaires, les agentes de bureau, aucune n'était présente. Contraintes ou désintérêt?

La causerie était animée par des instigatrices d'un organisme pour les femmes. Une dame très sympathique nous parlait des premiers souffles de son groupe, de certains maris qui ne savaient pas qu'ils devaient demander la permission à leur femme avant de leur sauter dessus quand ils en avaient envie. Elle nous a aussi mentionné un voyage où, pour la première fois, des femmes laissaient leur mari à la maison... avec des tas d'instructions sur les armoires (ça me rappelait le film Shirley Valentine). Malgré tout, cinq monsieurs sont tombés malades. C'était en 1981. Ça ne fait pas si longtemps.

Soubresauts intérieurs.

Et voilà, je plonge une fois pour toute. Il y a tellement de choses à dire sur le sujet, tellement de passions soulevées, tellement de visions. Et ça s'imbrique dans tout : le travail, le couple, la position sociale, la religion, l'humain, etc.

La femme est tellement devenue un symbole "controversé" que je parlerai plutôt de l'humainE avec un grand "e". Ça remet les choses en perspective. Parce qu'ultimement, c'est l'égalitarisme que je prône, pas le féminisme ni le masculinisme.

Pour terminer, deux articles de la Presse pour la journée de la femme :
"Ça prend l'union des deux pour aller plus loin. Le mélange parfait, du meilleur de l'homme et du meilleur de la femme. Également."
"On aurait tort, à l'autre extrême, de banaliser le retour en force de la «pitoune» soi-disant libérée."